Une pensée philosophique pour la table de billard
■ Le bouddha vivant Lian-sheng, Sheng-yen Lu
■ Discours abstrus sur la délivrance « Pointer du doigt la Lune »
■ Traduit du chinois par Sandrine Fang
■ Copyright © Sheng-yen Lu ©2017, Éditions Darong
Récemment, Lian-ning, Lian-dian, Lian-yai, Lili, Hanifa… et moi, nous jouâmes de temps en temps au billard dans une salle située au 2e sous-sol d’un immeuble. En fait, un jour, je passai par là , je pris la queue de billard avec laquelle je fis rouler des boules. Plus j’y jouais, plus j’étais rempli d’enthou-siasme, et finalement je fis vraiment une pa-rtie de billard.
Dès lors, je pratiquais le jeu de billard après le déjeuner. Je jouais au billard et mar-chais en coutournant la table de billard ; cela pouvait être considéré comme un petit sport.
Jouer au billard était pour moi un pur divertissement, prendre des notes était tout simplement amusant. Gagner ou perdre la manche, je n’en tenais pas compte, je n’en-trais pas non plus en compétition.
Parce que je suis le révérend maître.
Ils me laissent toujours gagner.
Ha ! Ha ! Ha !
Sur la table de billard, j’ai retiré un fruit de ce jeu :
– Il faut apprendre les techniques au jeu de billard ;
– Il faut mesurer les angles de tir, aigu, obtus, rentrant et droit, pour faire entrer une boule dans la poche, pour recevoir des points.
– Il faut contrôler la puissance du tir, grande, moyanne ou petite ; la force du coup doit être justement dosée, pour que le jeu soit excellent.
– Il faut observer la trajectoire de la boule ; empocher une boule et créer en même temps un bon trajet pour le prochain tir.
– Il faut apprendre les parties difficiles du jeu de billard et empocher les boules dans toutes les parties difficiles.
– Il faut en connaître toute la tech-nique ; empocher la boule en une seule frappe, peu importe sa position.
– Il faut une mesure bien versée en utilisant les angles de tir, la ligne de réfrac-tion, le tir orthogonal et la réverbération du tir pour faire entrer une boule dans le trou.
Etc., etc., etc.
Ceux qui jouent bien au billard dépen-dent à cent pour cent de la technique.
Ceux qui ne savent pas jouer au billard voient leur technique médiocre jouer avec un peu de chance ; donc leur chance à ce jeu est à la fois bonne et mauvaise.
Jouer au billard, c’est la boule, le joueur et son coeur s’unissent.
La main droite tient la queue en frap-pant la boule.
La main gauche peut aussi le faire.
Lancer la boule dans toutes sortes de positions.
Le joueur est stable.
Son coeur est ferme.
La queue de billard est équilibrée.
La boule est stable.
Le regard du joueur est assuré.
Un moine me demanda :
— Qu’est-ce que l’on pratique en jou-ant le billard ?
Je répondis :
— L’union.
Je compose une stance :
J’ai soixante-huit ans cette année,
J’ai déjà cherché la Voie ;
Je l’ai joyeusement rencontrée au-jourd’hui,
C’est en réalité la scène du billard.
Le moine demanda :
— Qu’est-ce que la Voie véritable ?
Je répondis :
— C’est un pouce carré.
Le moine interrogea :
— Qu’est-ce qu’un pouce carré ?
Je répondis :
— Le billard.
— Comment le billard peut-il être con-sidéré comme la Voie véritable ? deman-da le moine.
— Le billard se situe en ce bas monde ; tout l’univers est la table du billard, répon-dis-je.
Le moine dit :
— Je ne comprends pas bien.
Je dis :
— C’est-à-dire tourner et retourner !
(Mes saints disciples, essayez de com-prendre : s’il n’y a pas de boule sur la table de billard, que fera-t-on ?)
