L’aliment amoncelé pour la pratique de la perfection (2)
■ Le bouddha vivant Lian-sheng, Sheng-yen Lu
■ Discours abstrus sur la délivrance « Pointer du doigt la Lune »
■ Traduit du chinois par Sandrine Fang
■ Copyright © Sheng-yen Lu ©2017, Éditions Darong
De son vivant, le Bouddha nous a enseigné
trois sortes de bodhi :
1. La bodhi de shrâvaka : c’est l’illumination
parfaite acquise par les
disciples auditeurs qui pratiquent les
Quatre Nobles Vérités et les quatre
domaines de fixation de l’attention ;
2. La bodhi de pratyeka-buddha : c’est
l’illumination parfaite acquise par
les disciples illuminés solitaires qui
visualisent les douze maillons de la
production conditionnée0F
1, par exemple,
ils contemplent l’effloraison, et la
flétrissure, et ils obtiennent ainsi l’éveil
parfait ;
3. La bodhi de bouddha : les pratiquants
qui se livrent à la pratique du dharma
suprême et des méthodes inégalables
obtiennent la bodhi suprême et atteignent
l’état de bouddha merveilleusement
éveillé, c’est la bodhi la plus éminente.
(À l’époque du Bouddha, le nombre de
ses disciples qui avaient atteint la bodhi fut
considérable.)
Le bouddhisme d’aujourd’hui se divise en
cinq branches :
1. Le bouddhisme au Véhicule humain :
mettre en pratique les Cinq Préceptes
pour pouvoir renaître ici-bas ;
2. Le bouddhisme au Véhicule céleste :
pratiquer les Dix Bienfaisances pour
pouvoir renaître au paradis céleste ;
3. Le bouddhisme au Véhicule des auditeurs
: mettre en application les
Quatre Nobles Vérités pour pouvoir
acquérir le Fruit d’arhat ;
4. Le bouddhisme au Véhicule des illuminés
solitaires : pratiquer la visualisation
des douze maillons de la
production conditionnée pour pouvoir
acquérir le Fruit de pratyekabuddha
;
5. Le bouddhisme au Véhicule de bodhisattva
: s’exercer dans la pratique
des Six Pâramitâ1F
2 pour pouvoir atteindre
l’illumination parfaite, l’éveil
merveilleux, et acquérir le Fruit de
bouddhéité suprême.
Personnellement, je trouve qu’on ne saurait
faire reproche aux moines contemporains bouddhistes
qui préconisent le Véhicule humain ou le
Véhicule céleste en enseignant l’observance des
Cinq Préceptes et la pratique des Dix Bienfaisances.
Cependant, on ne proclame pas dans le
Monde Sahâ uniquement le Véhicule humain et le
Véhicule céleste, il faudrait vraiment suivre les
pas du Bouddha.
La raison est simple :
– au demeurant, ce bas monde est « souffrance,
vide, impermanence, non-moi », le malheur y est
plus grand que le bonheur ;
– en fin de compte, si la part du bonheur
dont l’on jouit dans le ciel s’épuise complètement,
on subira encore la chute dans les voies inférieures.
Je suis partisan de l’entrée ensemble des
Cinq Véhicules : les êtres humains, les êtres célestes,
les disciples auditeurs, les disciples illuminés
solitaires, les bodhisattvas, tous ont le droit, en
profitant des grands voeux du bouddha Amitâbha,
de prouver et d’entrer dans sa Terre réelle de
rétribution.
Personnellement, mes déités d’élection sont :
– la Mère d’or de l’Étang de jade ;
– le bodhisattva Ksitigarbha ;
– le bouddha Amitâbha.
C’est ma propre affinité prédestinée, il en existe vraiment une raison.
Les trois sortes de bodhi sont de la Loi droite ; les Cinq Véhicules bouddhiques font partie de la Loi droite. Alors que le Véhicule humain et le Véhicule céleste subissent encore le cycle des existences dans les six voies de la réincarnation.
Il y a effectivement quelques endroits communicants entre les pratiques du bouddhisme tantrique et celles du bouddhisme exotérique. Bien que leurs méthodes portent des noms différents et que leurs pratiques soient dissemblables, il existe bien réellement des points communs :
– le yoga de la concentration ;
– le yoga de l’abandon du divertissement ;
– le yoga du goût unique ;
– le yoga de la non-pratique.
Mon interprétation, c’est qu’il suffit d’avoir ré-alisé la correspondance avec la déité d’élection, on peut alors renaître à la Terre pure, au royaume du bouddha. Le yoga de l’abandon du divertissement, c’est une méthode sacerdotale. L’arrivée à l’état du goût unique, c’est alors être en communication libre. Le yoga de la non-pratique, c’est le dharma non conditionné.
L’école Wei Shih (l’école du rien-que-conscience) établit cinq étapes de la pratique :
– l’étape de l’amoncellement des aliments ;
– l’étape du cumul ;
– l’étape de la communication libre ;
– l’étape de la pratique assidue ;
– l’étape de l’achèvement définitif.
(Ces cinq étapes existent également dans le bouddhisme tantrique. On transforme finalement la conscience en sagesse pour atteindre de façon définitive l’état de bouddha.)
Pourquoi est-ce que je veux écrire tout cela ? Parce que le meilleur moment de la pratique de la perfection se trouve en ce bas monde, autrement dit, quand on est encore en vie, on se prépare déjà à savoir comment renaître dans le royaume du bouddha, à apprendre les enseignements du bouddha, qui permettent d’acquérir le Fruit de bouddhéité, et il faut l’attendre tout en en faisant provision très tôt.
Pour sauver l’âme de la personne défunte, on ne peut absolument pas attendre le moment de son agonie ou l’entrée de son âme dans l’état intermédiaire. Au moins, elle devait déjà, de son vivant, entendre un tel enseignement. Si on lui porte secours de cette manière, ce sera évi-demment le moyen le plus naturel et le plus merveilleux. Les meilleurs sont ceux qui avaient, de leur vivant, déjà pratiqué le dharma et qui en avaient acquis une correspondance, il suffit de leur donner quelques instructions, ils se réveilleront et obtiendront sur-le-champ la délivrance.
Si les gens n’ont pas d’idée de trans-migration,
Si les gens n’ont pas d’idée de renais-sance à la Terre pure,
Si les gens n’ont pas d’idée d’état intermédiaire, Comment les instruire ?
L’âme de la personne morte n’abandonne aucune des habitudes prises de son vivant. Par exemple, si elle aimait jouer au mah-jong, elle va rassembler des mânes de joueurs invétérés et continuer, dans l’état intermédiaire et illusoire, à jouer avec eux au mah-jong.
À suivre
1 Les douze maillons de la production conditionnée : l’ignorance, les formations karmiques, la conscience, le nom et
la forme, les six sources des sens, le contact, la sensation ou sentiment, la soif ou désir, la préhension ou attachement,
le devenir ou existence, la naissance ou renaissance, la vieillesse et la mort.
2 Ce sont la générosité transcendante, la discipline transcendante, la patience transcendante, l’énergie, la concentration
et la connaissance transcendante.