Le bouddhisme tantrique fait distinguer les couleurs(2)
■ Le bouddha vivant Lian-sheng, Sheng-yen Lu
■ Discours abstrus sur la délivrance « Pointer du doigt la Lune »
■ Traduit du chinois par Sandrine Fang
■ Copyright © Sheng-yen Lu ©2017, Éditions Darong
Lors de la procédure rituelle yogique pour alimenter les esprits affamés à la bouche enflammée, dans la pratique de la distribution des aumônes, pendant la pen-sée portée aux trois temps, dans les quatre dhyâna, dans les huit recueillements méditatifs (les quatre stades de la méditation au Monde de la forme et les quatre stades vides de la méditation au Monde de l’absence de forme : le premier état méditatif, le deuxième état méditatif, le troisième état méditatif, le quatrième état méditatif, la méditation dans la sphère de l’infini de l’espace, la méditation dans la sphère de l’infini de la connaissance, la méditation dans la sphère du néant, la mé-ditation dans la sphère de l’au-delà de la conscience et de l’inconscience), j’ai ob-servé avec mon oeil céleste.
Très nombreux sont ceux qui sont ignorants, lâches, indolents, incroyants, confus, nonchalants, impudents, éhontés, irascibles, versatiles, avares, jaloux, hargneux, blessants, rancuniers, flatteurs, vantards, vaniteux, belliqueux, sommeilleux, malfai-sants, avides, coléreux, orgueilleux, égoïstes, soupçonneux…
Et l’homme se passionne pour le renom, le profit, les louanges et les jouissances. Mais tout le monde éprouve le déclin, la destruction, la diffamation, la douleur.
Je vois d’ailleurs beaucoup de grands maîtres, de grands régisseurs des temples, de grands bonzes, de grands pratiquants de la perfection et enseignants du bouddhisme qui connaissaient très bien de leur vivant les doctrines du Bouddha. Ils expliquent merveilleusement les conceptions bouddhiques, ils enseignent également le dharma du bouddha et ils sont extrêmement assidus dans sa propagation.
Pourtant, il n’y a que ceci qui compte pour eux :
– jouir d’une célébrité mondiale ;
– jouir des offrandes et des profits.
Tous ces grands maîtres, ces grands régisseurs des temples, ces grands bonzes, ces grands pratiquants de la perfection manquent de ceci : la diligence pour la pratique.
Ils n’ont pas cultivé par la pratique « l’étape de l’amoncellement des aliments », ni « l’étape du cumul », ni « l’étape de la communication libre », ni « l’étape de la pratique assidue », ni « l’étape de l’achèvement définitif ». Le bouddhisme du Grand Véhicule a établi les cinquante-deux degrés de progression vers l’Éveil : les dix degrés de foi, les dix demeures où l’individu s’éveille à la vertu, les dix pratiques visant à sa perfection et à celle d’autrui, les dix dédicaces des mérites, les dix terres de développement de l’Illumination, l’Illumination égale, l’Éveil parfait.
Ils ont compris tout cela, seulement ils ne s’exercent pas réellement à la pra-tique de la perfection.
Ils s’affairent à la méthode de l’attachement au monde, à tout ce qui est sécu-lier et imparfait.
Ils portent leur attention sur la quête en vue d’édifier de grands temples. Ils estiment le renom et le statut social. Ils sont fascinés et troublés par l’opinion, le désir, la possession et l’ignorance qui font subir la transmigration dans différentes existences successives.
Bien que ces grands pratiquants enseignent ici-bas le dharma du bouddha, ils ne le pratiquent pas avec diligence, ils n’ont même pas la connaissance de l’âme qui se trouve dans l’état intermédiaire, ils ne cultivent pas leur coeur, voire même diffament la religion tantrique. Par conséquent, quand leur âme se trouve dans l’état intermédiaire, elle devient alors déconcertée en voyant la manifestation des illusions. Par défaut de pratique persévérante de la méditation, à cause de l’insuffisance de leur force méditative, ils tombent évidemment dans un état misérable, tout comme s’ils se trouvaient dans leur rêve.
En conséquence, l’habileté à enseigner le dharma, à expliquer la doctrine, à édifier des temples et à établir de bons liens ne vaut pas mieux en fin de compte que l’habileté à pratiquer avec persévérance le dharma.
En revanche, je suis d’avis que l’habileté à enseigner le dharma est aussi bonne que l’habileté à expliquer la doctrine, à édifier des temples et à établir de bons liens, mais l’habileté à pratiquer avec persévérance le dharma est encore plus importante. Ceux qui sont habiles à pratiquer diligemment le dharma sont de grands détenteurs de facultés parfaites.
Si ce genre de grands pratiquants réalisent leurs pratiques de la perfection, ils arrivent immédiatement à la Vérité absolue, au Coeur Véritable, c’est-à-dire qu’ils parviennent à l’Éveil sans avoir besoin de passer le bardo0F1.
Ces gens-là réalisent alors le Fruit de bouddhéité durant leur vie présente, ils rentrent à la Terre pure de la joie parfaite, et des phénomènes de bon augure se manifestent sans arrêt pour eux :
– le ciel clair, sans nuage, envoie des rayons de lumière dans toutes les direc-tions ;
– un grand arc-en-ciel apparaît ;
– la musique céleste emplit le ciel et des parfums extraordinaires montent au nez ;
– les lumières propices rayonnent, toutes les fleurs s’épanouissent ensemble ;
– après leur incinération, ils laissent derrière eux des ossements ou des dents comme reliques en forme de perle ou en forme de fleur.
fin
1 L’état intermédiaire.