Desir, desir, desir, desir, desir
■Le bouddha vivant Lian-sheng Sheng-yen Lu
■Book 200 - L'Eveil parfait et universel
Une tranche et encore une tranche d'Illumination
—L'esprit intelligent de la vie—
■Traduit du chinois par Sandrine Fang
■Copyright c Sheng-yen Lu c2013, Editions Darong
Un disciple me demanda :
— Est-ce que l’homme d’Eveil a le desir ?
Je repondis :
— Oui.
— Quand le desir ne peut etre obtenu, est-ce exactement un ennui ?
Je repondis :
— C’est un ennui.
Le disciple demanda :
— Faut-il alors supprimer le desir ou suivre le desir ?
Je repondis :
— Il n’est pas question de le supprimer ni de le suivre.
Le disciple dit :
— Je ne comprends pas.
Je repondis :
— Je ne comprends pas non plus.
Le disciple montra un visage completement deconcerte.
Voici mes indications :
Les disciples portant le nom de Sakya1de l’ancien temps et du temps present pratiquent l’ascetisme avec ardeur. Leur objectif, c’est de supprimer leurs desirs.
Pour ceux dont les pratiques soutenues ont atteint une grande profondeur, ils sont effectivement capables de supprimer leurs desirs de possession et d’amour tout en gardant une vie simple et detachee : avec trois vetements2 et un bol a aumone, ils passent leurs jours dans la solitude.
Quelqu’un dit :
— Les desirs ressemblent aux herbes. Si un rocher est pose dessus, les herbes ne poussent plus. Mais, si le rocher est deplace, les herbes repoussent.
C’est bien incorrect si l’on suit les desirs et que l’on flotte et s’immerge dans la mer de desirs. La vie du commun des mortels n’est-elle pas comme ca ?
Si l’on cherche le renom, poursuit le profit, convoite le sexe ou s’adonne aux passions, on n’est donc pas du tout un pratiquant de la perfection. Si l’on fait la cour au desir, on sera plus banal que les gens ordinaires, et comment peut-on se delivrer des souffrances ici-bas ?
Voici ce que j’ai saisi :
– le desir est vide ;
– le renom et la position sociale sont vides ;
– la richesse et les tresors sont vides ;
– l’appetit sexuel est vide ;
– la luxure est vide.
Meme si vous possedez tout cela, tout deviendra effectivement le vide. (C’est la vacuite.)
Le grand kulapati3 Vimalakirti qui avait compose le Sutra de l’enseignement de Vimalakirti etait justement un modele qui ne supprime pas les desirs et qui n’y cede pas non plus.
Pour Vimalakirti :
– le desir est le dharma du bouddha ;
– le desir qui n’est pas le desir, c’est le desir ;
– l’ennui qui n’est pas l’ennui, c’est l’ennui ;
– l’ennui, c’est la bodhi.
Le kulapati Vimalakirti etait un homme d’Eveil, il ne disait pas si le desir etait bien ou non. Cependant, d’apres les faits, bien qu’il n’attache pas d’importance a toutes les choses, ses pratiques soutenues avaient largement depasse celles de tous les ascetes.
Un moine bouddhiste qui m’avait fait raser la tete vint chez moi.
Je lui demandai :
— Ou allez-vous ?
Il repondit :
— Je vais recevoir les Trois Grandes Ordinations4
— Quel est l’avantage de recevoir les Trois Grandes Ordinations ? demandai-je.
Il repondit :
— Cela permet de se delivrer des souffrances provenant de la vie et de la mort.
Je dis :
— Un individu n’a jamais recu les Trois Grandes Ordinations, mais il est capable de se liberer de la vie et de la mort. Qui est-il ?
Le moine restait muet sans savoir quoi repondre.
(Je demande a mes saints disciples : connaissez-vous la reponse ?)
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1. Nom de la lignee aristocratique dont est issu le bouddha Siddharta Gautama.
2. D’apres les regles monastiques, les bonzes ne portent que trois vetements.
3. Mot sanscrit qui signifie un laic lie par des engagements bouddhiques, mais qui vit dans sa famille.
4. L’ordination du Sramanera, l’ordination du Bhiksu et l’ordination du Bodhisattva.
