Le maître vénérable qui tient un siège de lotus(1)
■ Le bouddha vivant Lian-sheng, Sheng-yen Lu
■ Discours abstrus sur la délivrance « Pointer du doigt la Lune »
■ Traduit du chinois par Sandrine Fang
■ Copyright © Sheng-yen Lu ©2017, Éditions Darong
Un disciple de l’école du Vrai
Bouddha était à l’agonie et des signes
de la mort se manifestaient déjà en lui,
comme le phénomène de « la grande terre
qui s’enfonce dans l’eau et le feu » ; alors
il était entré dans le coma que la plupart
des gens appellent alors l’état inconscient.
En général, la durée comateuse varie
selon les individus :
– pour ceux qui pratiquent fermement
la méditation, la durée est longue ;
– pour ceux qui ne pratiquent jamais
la méditation, la durée est courte ;
– pour certains, le temps d’une
chiquenaude, et leur âme apparaît alors
dans l’état intermédiaire.
Ce disciple se réveilla et vit que
son maître vénérable se tenait debout
dans l’espace en portant à la main un
siège de lotus. Le maître lui conseilla de
monter sur celui-ci pour aller renaître
au maha Étang au Double Lotus.
Il lui dit :
— Pratiquant au lotus0F
1, vos facteurs
conditionnant ce bas monde sont déjà
finis, vous devez oublier tout ce qui est
dans le monde terrestre, il vous faut en
prendre la décision de la manière suivante.
Il ne vous reste qu’à monter sur le siège
de lotus, en profitant de cette belle occasion,
pour aller renaître au maha Étang au
Double Lotus. Pour le profit et le bonheur
des êtres vivants du monde infini, pour
qu’ils puissent quitter les douleurs et
obtenir le bonheur, le bouddha vivant
Lian-sheng, Sheng-yen Lu, est alors venu
vous recevoir par la puissance de son
voeu. Cela fait en sorte que tous les êtres
vivants réalisent ensemble la bodhi et
atteignent l’état définitivement achevé
et parfait.
Ce disciple articula :
— Om Goulou Lianshen Siddhi
Rom.
Il monta alors sur le siège de lotus
qui est précisément « la nature de la
sagesse » : son origine est la vacuité, elle
n’a ni couleur ni apparence, elle est la
Réalité absolue et l’essence ultime des
choses. Le siège de lotus est la lumière de
la nature du Monde dharmique de
Samantabhadra.
Cependant, à cet instant précis,
l’épouse et les enfants de ce pratiquant
au lotus criaient, pleuraient, sanglotaient
lugubrement :
— Si tu t’en vas en nous abandonnant,
qu’est-ce que nous devons faire ? se lamenta
son épouse.
— Papa ! Papa ! appela son fils.
— Tu ne peux pas mourir, tu ne
peux pas t’en aller, mon cher papa, tu ne
peux pas mourir, tu ne peux pas partir,
dit sa fille en pleurant.
Son épouse hurla à nouveau :
— Tu t’en vas avec la dureté au
coeur, mais les dettes ?
Le pratiquant était déjà monté sur
le siège de lotus, il était sur le point de
se délivrer de la souffrance et d’obtenir
la joie. En entendant pleurer à grands
cris, en voyant les dettes qui n’étaient
pas encore remboursées, son esprit avait
reçu un impact et une mauvaise influence
s’était produite. Il descendit alors du
siège de lotus et se creusa la tête :
— Mes dettes ne sont pas encore
remboursées, en fin de compte, je suis
mort ou pas ?
Il ne pouvait même pas affirmer
s’il en était certain ou non. Il avait tout de
même vu ses proches parents, ses amis,
ainsi que son épouse et ses enfants, et
leurs lamentations bruyantes retentissaient
complètement à ses oreilles.
À ce moment-là, le roi des enfers
apparut accompagné de spectres serviteurs.
Ces ombres terrifiantes des esprits malfaisants
arrivèrent nombreuses. Entre-temps, je
dis au pratiquant :
— Ô pratiquant au lotus ! Votre
affinité prédestinée avec ce monde de
lumières est terminée. Ah ! déposez tout !
Le roi des enfers et les spectres serviteurs
sont déjà arrivés. Pensez vite à votre déité
d’élection qui vous surveille ! Récitez
vite le mantra du protecteur dharmique,
de tout votre coeur non troublé, montez
encore avec sincérité parfaite sur le siège
de lotus ! Le monde humain ressemble à
une illusion, les affaires du monde sont
comme un rêve, comme la lune à la
surface de l’eau. Dépêchez-vous de vous
rendre au maha Étang au Double Lotus.
Le pratiquant au lotus restait
perplexe… car les sanglots de son épouse
et de ses enfants ébranlaient le ciel et il
n’avait pas le coeur de les laisser. Mort, il
pensait encore aux affaires du monde,
étroitement enchevêtrées :
— Mon épouse est encore jeune,
mes enfants sont encore petits, si je m’en
vais, à vrai dire, comment vivront-ils leur
vie ? C’est vrai, comment subsisterontils
alors ?
Je le réprimandai à grands cris :
— Bien qu’il existe en ce bas monde
des substances visibles, celles-ci sont
constamment changeantes, impermanentes,
leur existence n’est vraiment pas réelle.
L’important est de renoncer avec empressement
au monde !
Pourtant, il ne voulait pas l’entendre.
À suivre
1 Pratiquant qui porte le mot de lotus sur son nom de religion.