Le maître officiant qui préside une cérémonie de la délivrance(1)
■ Le bouddha vivant Lian-sheng, Sheng-yen Lu
■ Discours abstrus sur la délivrance « Pointer du doigt la Lune »
■ Traduit du chinois par Sandrine Fang
■ Copyright © Sheng-yen Lu ©2017, Éditions Darong
Faire véritablement une cérémonie pour un mort renferme effectivement un sens occulte, il ne s’agit pas uniquement de l’apparence extérieure.
Il y a là-dedans le tantra théorique, le tantra applicateur, le tantra yogique et le tantra suprême.
Tout d’abord, invoquer les bouddhas, les bodhisattvas, les déités de diamant, les protecteurs du dharma, les dâkinî et tous les êtres célestes.
Ensuite, évoquer les âmes des défunts qui sont entrées dans l’état intermédiaire et qui attendent d’être délivrées de l’état de souffrance.
Après, faire des offrandes aux bouddhas, aux autres divinités et aux âmes qui se trouvent dans l’état intermédiaire.
La procédure rituelle yogique pour alimenter les esprits affamés à la bouche enflammée ou la distribution des aumônes alimentaires au mont Meng-shan sont toutes comprises là-dedans.
Ce qui est le plus important, c’est de choisir un maître illuminé qui enseigne aux âmes qui sont dans l’état intermédiaire, aux génies et aux participants la droite raison de la délivrance.
Visualiser que le corps est impur.
Visualiser que les sensations sont la souffrance.
Visualiser que le coeur est inconstant.
Visualiser que le dharma se base sur le non-moi.
L’enseignement de la souffrance, de la vacuité, de la non-permanence et du non-moi permet à tous ceux qui entendent l’enseignement du dharma, comme les âmes des défunts et les génies participants, de couper le noeud qui les attache aux Trois Mauvaises Voies.
Le maître illuminé devrait enseigner et expliquer la voie de la bodhi transmise par le Bouddha. Elle est la sagesse, l’essence ultime des choses, qui fait atteindre l’autre rive. C’est un enseignement particulièrement donné aux âmes des défunts de haute disposition naturelle, aux spectres, aux génies, aux protecteurs du dharma, aux dragons et aux êtres célestes. Si l’on peut comprendre le coeur, pénétrer la nature et entrer dans l’essence ultime de la sagesse, c’est grâce à la véritable part du bonheur alloué par le ciel. Lors de la cérémonie de la délivrance, il se peut que, chez beaucoup de mânes des défunts qui sont entrés dans l’état intermédiaire, les rancuniers et les créanciers viennent, en profitant de cette période, réclamer leurs dettes ou leurs objets dus ; leurs ressentiments s’embrouillent confusément et obscurément. Le maître illuminé devrait leur apprendre qu’« ennemis et amis sont égaux » pour que les deux camps puissent se réconcilier, et les inviter à faire ensemble le voeu de dissiper les inimitiés et de ne pas les entretenir. Ainsi, les deux camps vont renaître tous dans le Monde de la joie parfaite, en éprouvant chacun de l’allégresse.
Il faut aussi pendant la cérémonie « la pensée incessante à trois temps ».
Le maître illuminé recueille la claire lumière du bouddha ou du bodhisattva qui est la déité d’élection pour que celle-là vienne recevoir les esprits des ancêtres, les âmes des défunts dans l’état intermédiaire, les mânes rancuniers et les génies venus assister à la cérémonie de la délivrance. En outre, si les participants, qui étaient des disciples du Bouddha dans le monde des lumières, écoutent les paroles avérées du maître de diamant et comprennent l’enseignement du Bouddha, ils acquerront alors la prajñâ, la sagesse, tout en suivant la voie de la bodhi et la voie de la délivrance, et obtiendront un suprême intérêt protégé par le dharma.
Le royaume des ténèbres et celui des lumières procurent tous les deux des profits ;
Les spectres et les génies se délivrent de l’état de souffrance ;
Tout le monde y ajoute foi et observe ;
C’est ainsi la véritable cérémonie de la délivrance.
J’ai vu un faux maître officiant qui n’avait aucune clairvoyance, il n’avait pas pris refuge dans les Trois Joyaux0F1, ni reçu aucune ordination, il n’était jamais entré en religion, il ne pratiquait jamais les méthodes tantriques. Cependant, il avait imité les gens pour réciter des prières de repentance et, après quelques jours d’apprentissage des règles, il se disait déjà maître officiant.
Il portait sur sa tête une « tiare à cinq bouddhas » (qu’il avait achetée lui-même) et tenait à la main une époussette rituelle, il avait des cheveux longs, il portait un pantalon droit, une robe de moine, un châle rouge, un rosaire autour du cou, et il était chaussé de sandales.
Il cherchait à nouer des relations avec des entrepreneurs de pompes funèbres pour qu’il puisse se charger en personne de toutes les funérailles, et il avait même engagé des gens pour former une équipe. Il présidait partout des cérémonies de la délivrance et devenait un faux maître officiant professionnel ne travaillant que pour le profit.
Le mantra de distribution alimentaire qu’il récitait n’est pas enseigné par un maître, les mudrâ qu’il faisait non plus. Les cérémonies mortuaires qu’il présidait n’étaient qu’une apparence, les funérailles et les cérémonies de la délivrance qu’il organisait étaient de plus en plus grandioses. Existe-t-il un autre maître officiant du même genre ?
Bien sûr que oui ; ils sont même en grand nombre.
1 Les Trois Joyaux du bouddhisme sont les bouddhas, le dharma et les sangha.