La sollicitude à l’égard des mourants (III)
■ Le bouddha vivant Lian-sheng, Sheng-yen Lu
■ Le Franchissement de l’océan de vie et de mort
« Le plus grand événement de la vie »
■ Traduit du chinois par Sandrine Fang
■ Copyright © Sheng-yen Lu ©2022, Éditions Darong
Connaissez-vous quelqu’un qui, en temps habituel, se cultivait bien dans sa pratique de la perfection, autrement dit, qui vénérait son maître, estimait le dharma et le pratiquait diligemment, mais qui lors de son agonie ou dans l’état intermédiaire a subi un brusque changement ?
Je dis oui.
Je dis sincèrement et concrètement à tout le monde : quand les créanciers de sa vie antérieure ou de sa vie présente ont vu qu’un homme était à l’article de la mort ou dans l’état intermédiaire, ils se sont élancés vers lui et l’ont obsédé, et, à ce moment-là, il a subi un changement total. On dit alors que c’est « l’apparition du karma négatif ».
De son vivant, quand il voyait l’image de son maître vénérable, le bouddha vivant Lian-sheng, Sheng-yen Lu, il pouvait réciter en joignant les mains : « Om Goulou Lianshen Siddhi Rom ». Il avait accroché chez lui un portrait de son maître vénérable, et il avait installé dans son sanctuaire privé une statue de Padmakumara, son gourou-racine, devant laquelle il se prosternait, qu’il la vénérait et à qui il donnait des offrandes tous les jours.
Quand il était entré en agonie, il avait changé. L’image de son maître vénérable avait été arrachée. Il avait fait casser l’effigie de ce dernier.
Les statues des bouddhas et des bodhisattvas installées sur son autel avaient été balayées l’une après l’autre, soit il les avait abandonnées, soit il les avait données à autrui.
La famille du mourant prit le portrait de son maître vénérable et lui dit :
— C’est votre maître vénérable !
Il s’écria :
— X… X… X… (une insulte vulgaire en trois mots).
Ses yeux répandirent une lumière bleue :
— Brûlez-moi ça !
Ses parents restèrent stupéfaits, sans savoir comment agir.
Sa famille lui montra une image du bouddha Amitâbha, pareillement, sa bouche jeta un « X… X… X… »
Il le vénérait de son vivant comme un joyau, pourtant, à l’agonie, il n’arrêtait pas de le prendre en haine. Il n’aimait plus les bouddhas, ni le dharma, ni les communautés bouddhistes ; si un moine ou un maître entrait dans la pièce où il se trouvait, dès qu’il le voyait, il le mettait immédiatement dehors. Il rugissait des injures en vociférant fort qu’il détestait les gens qui récitaient le nom du bouddha et le mantra ; s’il entendait la récitation, il s’écriait alors :
— Arrêtez ! Je vous interdis de le réciter !
En face d’une telle situation, sa famille était embarrassée et n’avait aucune solution.
Toute l’équipe de récitants était vertement réprimandée.
Qu’est-ce qui s’était passé ? De son vivant, il vénérait son maître, estimait le dharma et le pratiquait avec diligence, mais lorsque le moment le plus important arrivait réellement, sa récitation du nom du bouddha se transformait en « X… X… X… » Il devenait une tout autre personne entièrement différente.
C’était l’âme rancunière qui venait réclamer sa dette de vie ;
Le créancier était venu poursuivre son dû ;
L’apparition du karma négatif empêche la renaissance à la Terre pure.
J’en compris alors tout de suite la raison, et je dis à ses proches parents de se dépêcher de
réciter dans une autre pièce le Sûtra du vœu primordial du bodhisattva Ksitigarbha, et de lui
dédier le mérite de la récitation. (Si on ne sait pas lire le Sûtra du vœu primordial du bodhisattva Ksitigarbha, on peut psalmodier le saint nom du bodhisattva Ksitigarbha.)
Les disciples pratiquèrent « la méthode de la pénitence » et lui dédièrent le mérite de la récitation. L’équipe de récitants continuait à prononcer le nom du bouddha et le mantra devant l’image du bouddha ou dans une autre pièce.
J’appliquai alors « la méthode de la distribution des aumônes aux génies et spectres » en leur demandant de partir. Je fis même la démarcation de défense.
Après quoi, l’agonisant reçut l’image du gourou-racine et des Trois Joyaux, accepta aussi la récitation du nom du bouddha et du mantra, et une joie s’éleva en lui. Finalement, il partit pour renaître à la Terre pure.
Je cite encore un exemple :
Dans l’état intermédiaire, je vis s’avancer un pratiquant au lotus. Il me regardait comme s’il ne me voyait pas. Son regard était si froid que je l’aurais tenu pour un étranger.
Je lui fis signe :
— Pratiquant au lotus. Il m’interrogea :
— Qui êtes-vous ?
— Je suis votre maître !
— Je ne connais aucun maître. Fichez le camp de là !
(De son vivant, ce disciple m’avait offert des offrandes.)
Je vis sur-le-champ une femme spectre habiter son corps en l’entraînant à entrer dans l’enfer. C’était à cause de lui que cette femme s’était suicidée.
Je dis à la femme qui l’obsédait :
— Vous ne pouvez pas faire ça.
Elle répondit :
— Il m’a quittée de mon vivant, la douleur de la séparation était si extrême que je ne voulais plus continuer à vivre, je me suis donc donné la mort. Eh bien, maintenant, je veux aussi l’empêcher d’aller renaître à la Terre pure.
Je dis à cette femme :
— Je vais vous aider tous les deux à renaître à la Terre pure !
— Qui êtes-vous ? Comment auriez-vous la capacité de me seconder ?
Je me transformai en bodhisattva Ksitigarbha. Elle éprouva une grande joie.
Finalement, ce pratiquant au lotus et cette femme suicidée allèrent ensemble renaître au maha Étang au Double Lotus, dans le Monde de la joie parfaite de l’Ouest. Lui se réincarna dans un stade moyen des neuf niveaux d’accomplissement du disciple, classés par l’école de la Terre pure, et elle gagna le dernier stade parmi les neuf niveaux d’accomplissement.
Voici mon point de vue personnel :
Chez les agonisants ou les âmes qui sont entrées dans l’état intermédiaire, beaucoup d’entre eux ont au dernier moment un brusque changement de sentiment. Pour eux, l’homme à la grande connaissance de bien les exhorte avec des paroles avérées, l’équipe de récitants, sa famille, le grand maître ou le maître officiant leur viennent rapidement en aide : pratiquer la méthode de la pénitence, réciter le Sûtra du vœu primordial du bodhisattva Ksitigarbha, appliquer la méthode de la distribution des aumônes aux génies et spectres, faire la démarcation de défense.
C’est important ! Très important !